mardi 9 août 2011

Le gâteau de Juliette


        
En tombant sur ce livre, je m’attendais à lire un roman à « fille bobo nouvelle vague», c’est-à-dire un roman dans lequel l’héroïne est une parisienne trentenaire fashionista qui lit Sartre et fréquente les cinémas d’arts et d’essais, vous voyez ? Le genre de roman qu’on trouve souvent chez Allia. Ce n’est pas péjoratif, je suis la première à les lire.
En réalité, il n’en est rien. On se retrouve immergé dans la communauté transsexuelle de la ville de Tours. L’héroïne, Juliette, dont l’identité sexuelle ne sera jamais clairement précisée, vit en colocation avec Anna-Lisa, une chercheuse universitaire elle-même transsexuelle. Les deux colocs évoluent dans cette communauté.
Si le récit est à la première personne, Juliette est comme mise en retrait pour mieux observer les autres. On évite l’autoanalyse (alors qu’on peut supposer que ce roman est en partie autobiographique) pour être au contraire dans une forme de distanciation bienvenue.
C’est toute une galerie de personnages au parcours singulier, douloureux souvent, empreint de doute, dont l’auteure nous brosse le portrait. Ce roman aborde plus particulièrement cette délicate période du passing, de la transition pendant laquelle ces hommes se meuvent peu à peu en femmes, à l’aide de chirurgie et de médicaments. Il montre que bien au-delà d’une simple transformation physique et sexuelle, c’est le rapport à la féminité et à soi-même qui est interrogé. Comment se penser femme lorsqu’on ne l’a pas toujours été ? Pour autant, ce questionnement, qui revient sans cesse sous diverses formes, intéresse toutes les femmes ; la féminité ne va pas de soi. Simone De Beauvoir n’a-t-elle pas dit « on ne naît pas femme, on le devient » ? Mais comment le devient-on ? L’auteure n’apporte pas de réponse particulière, elle ne fait que soulever des questions complexes, dérangeantes mais essentielles aux travers des différents personnages, non sans humour.
Ce roman n’est pas parfait ; on regrette que le rêve soit parfois utilisé à des fins obscures, ce qui vient entraver la cohérence du récit. Mais on ne peut que saluer la force de ce roman servi par une élégante, fine et limpide écriture.
Et puis, on est charmé par la gourmandise de Juliette qui prépare un irrésistible fondant au chocolat (qui, au vu des proportions, doit ressembler à l’inénarrable fondant de Nathalie de Trish Deseine. La recette est détaillée ici) et sert à ses copines un délicieux gâteau à l’ananas et au nappage coco…C’est l’évocation de ce dernier qui m’a le plus mis l’eau à la bouche…



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Extrait :
"Je sortis le gâteau du four ; il était bien doré au centre, brun caramélisé à son pourtour, et il embaumait la vanille.
[...]
Mon gâteau créole (ananas et noix de coco) fut accueilli par des "oh !", des "ah !", des "mmh !"...
[...]
-Dé-li-cieux ! s'exclama Marie-Hortense. Il faudra que tu me donnes la recette !
-A moi aussi ! renchérit Anne-Charlotte.
-Un peu de chantilly ? dis-je à Zénaïde. C'est un peu sec à cause de la noix de coco.
-Tu me prends par les sentiments, répondit Zénaïde avec une espèce de grimace. J'ai deux kilos à perdre...
-Deux kilos ! rétorqua Sarah-Jessica. Et tu te plains !
-Je revoudrais bien de la crème fouettée, dit Marie-Hortense en me tendant sa petite assiette. Juste un pschit. Merci. Alors il y a quoi dans ton gâteau ? Des rondelles d'ananas sur une génoise ? Et la noix de coco ?
-En nappage. Je mélange quatre oeufs, cent cinquante grammes de noix de coco, cent cinquante grammes de cassonade, un sachet de sucre vanillé...
-Dis-donc, je comprends pourquoi c'est si bon..."

Tentant, non ? Il me fallait la recette ! D'autant que j'aime beaucoup l'idée d'un gâteau qu'on prépare en pensant à une histoire dans laquelle on a aimé se plonger.
Ni une ni deux, j'ai envoyé un mail à Juliette Jourdan en lui demandant la recette. Le lendemain, sa gentille réponse me parvenait en me détaillant la chose...
Verdict ?
Un gâteau délicieux, à déguster de multiples façons : avec de la chantilly comme Juliette, avec de la crème de coco en coulis, une boule de glace vanille ou rhum-raisin, une salade de fruits exotiques...On peut aussi le couper en deux dans l'épaisseur et le tartiner de confiture de son choix.
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Gâteau à l'ananas et à la noix de coco

Pour la pâte
200 g de farine
100 g de sucre
1 sachet de levure chimique
2 oeufs
5 cuillères à soupe d'huile
5 cuillères à soupe de lait
Des tranches d'ananas en boîte

Pour le nappage
100 g de noix de coco râpée (oh ! les proportions ne sont pas tout à fait les mêmes que dans l'histoire...)
100 g de sucre
1 sachet de sucre vanillé
4 oeufs

Préchauffer le four à 180°C.

Dans une jatte, mélanger tous les ingrédients de la pâte (sans les tranches d'ananas), de préférence au batteur.
La pâte doit être lisse et onctueuse.

Verser ce mélange dans un moule beurré (ou recouvert de papier sulfurisé).

Disposer les tranches d'ananas sur la pâte.

Mélanger tous les ingrédients du nappage dans un récipient puis verser uniformément le tout sur les tranches d'ananas.

Enfourner pour environ 35 minutes (surveiller à la fin). Le centre du gâteau ne doit plus être tremblotant et le dessus doit être bien doré.



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Le choix de Juliette, Juliette Jourdan, Le dilettante, 22 euros.

Merci Juliette !

18 commentaires:

Messergaster a dit…

Tu as trop bien fait à envoyer le mail ! Le roman que tu mentionnes semble en effet assez intéressant. La prochaine fois que je tombe dessus à la fnac, je le feuilleterai ! Et merci d'avoir partagé la recette.

Juices And Cakes a dit…

En plus d'être beau, il porte mon nom ce gâteau! Je sens que ça va atterrir sur mon blog ça (:

flou a dit…

j'aime bien les livres qui inspirent des recettes!

Julsango a dit…

Quelle bonne idée d'avoir envoyer ce mail! Jamais je n'aurais pensé le faire!!! Ça valait la peine car gâteau à l'air divinement bon!

Pénélope a dit…

très agréable recette !
j'adore ce style de gâteau !
bisous

Amélie a dit…

Très tentant oui ! J'aime aussi l'idée d'une recette "tirée" d'une histoire. A déguster avec un bon chocolat chaud pour moi ! :)
Bonne soirée, bisous

La Francesa sans fourneaux a dit…

Un livre dont l'histoire n'a, a priori, rien de gourmand et par une grâce inattendue il va te mettre en appétit. Et quel gâteau, chapeau pour l'écrivaine (?) de s'être montrée disponible et chapeau pour ton initiative pour être aller lui demander directement!
Et un résultat délicieux
Besooooooooos

Christel a dit…

Très joli voyage avec ce gâteau gourmand! C

Chris a dit…

Oui, finalement il faut oser ! Les gens sont souvent plus simples et accessibles qu'on le croit.
C'est un gâteau que je n'aurais pas forcément eu envie de faire spontanément mais l'idée qu'il sortait d'un roman me plaisait. C'est un peu comme les recettes de famille ; ce sont en général des plats classiques mais on y est attaché d'une manière ou d'une autre...

Gen a dit…

Dis donc la recette originale! C'est formidable qu'elle t'ai répondu! Et ça valait le coup!

Gen a dit…

Dis donc la recette originale! C'est formidable qu'elle t'ai répondu! Et ça valait le coup!

Gen a dit…

Dis donc la recette originale! C'est formidable qu'elle t'ai répondu! Et ça valait le coup!

Hélène (Cannes) a dit…

Littérature et gourmandise vont bien ensemble ...
Bonne journée
hélène

Laurent [alias Mr Poulet] a dit…

Voilà un sujet bien philosophique, voire métaphysique...

Agnèslamexicaine a dit…

mmm je remplacerais bien l'ananas par de l'orange, ou de la mangue... (pas fan de l'ananas cuit)...

steve a dit…

Très belle ambiance rustique et ce gâteau ... coco ananas, miam !

"pose"gourmande a dit…

ce gateau me fait vraiment envie! je note cette recette

"pose"gourmande a dit…

j'adore l'idée de refaire la recette du roman!